L’activation de la loi pandémie belge sans passer par ’Autorité de protection des données «est illégale»

"L’activation de la loi pandémie sans passer par l’APD «est illégale»

Jeudi, la majorité parlementaire a accepté la demande du gouvernement de se passer de l’avis de l’Autorité de protection des données pour déclarer la situation d’urgence épidémique. « Le Parlement décide sciemment de violer le droit européen », estime Elise Degrave.

Responsable du pôle Multimédias; Par Philippe Laloux Temps de lecture: 3 min

 

Entre la COP26 ou le procès Deliveroo, la vie privée s’était à nouveau invitée au parlement, ce jeudi. Ce fut le cas pour la fuite de données Helena révélée par Le Soir. Mais aussi pour l’activation de la loi pandémie, déclarant la situation d’urgence épidémique pour une durée maximale de trois mois. Le paquet législatif n’est pas mince puisque l’on y trouve la base légale pour le certificat covid européen, le Covid Safe Ticket, le PLF…

Pour faire passer ce giga-texte, le gouvernement devait donc envoyer l’accord de coopération initial (celui qui règle la tuyauterie entre le fédéral et les entités fédérées) devant le parlement. Comme cet accord a été modifié, pas le choix : il faut soumettre le texte à l’avis de l’Autorité de protection des données (APD).

C’était l’avis du Conseil d’Etat. Mais pas celui du gouvernement. Le ministre de la Santé Frank Vandenbroucke n’a en effet pas jugé utile de reprendre contact avec l’APD, estimant que le volet « traitement des données » de l’accord de coopération n’avait pas été modifié. La majorité a acquiescé. L’opposition s’est étranglée. « C’est dire le peu de cas que vous faites du respect des règles », a déploré Catherine Fonck (CDH). « Il y a eu un avis de l’APD sur le texte initial. Un changement de texte doit à nouveau passer par l’APD. Vous ne pouviez pas, il y a 48 heures, prendre contact avec eux ? » « Vous dites le contraire de ce que dit le Conseil d’État », a renchéri Nabil Boukili (PTB) : « l’avis de l’APD est obligatoire. »

C’est aussi ce qu’estime Elise Degrave, professeure à la faculté de droit de l’UNAmur : « Le Parlement décide sciemment de violer le droit européen qui s’impose pourtant à la Belgique sans marge de manœuvre. L’article 36.4 du RGPD impose en effet l’obligation ferme de consulter l’APD, dès lors que l’on touche aux données. En décidant de se passer de son avis, le Parlement sombre dans le « pas vu pas pris », se comporte comme un cambrioleur qui désactive les alarmes avant de passer à l’acte et prive les citoyens de cette garantie. C’est grave. On peut douter que cela plaise à la Commission européenne qui a déjà la Belgique et ses traitements de données dans le radar. »

 

Ce vendredi, sur les antennes de La Première, Didier Reynders, commissaire à la Justice, confirmait d’ailleurs que la Cour de justice de l’Union européenne, pourrait d’ici peu se saisir de l’affaire. Le gouvernement n’a en effet toujours pas donné de suite convaincante à la procédure d’infraction au RPGD lancée par la Commission à l’égard de la Belgique.

 

Source:  https://www.lesoir.be/403552/article/2021-10-29/lactivation-de-la-loi-pandemie-sans-passer-par-lapd-est-illegale

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