Faut-il supprimer les pommes de terre de votre alimentation ?

https://www.ipsn.eu/wp-content/uploads/2022/06/shutterstock_357941285.jpg

Chère amie, cher ami,

La pomme de terre vient du Pérou.

Elle a été rapportée en Europe par les Espagnols au 16e siècle et introduite en France par l’un de nos agronomes les plus célèbres : Olivier de Serres.[1]

Considéré comme le père de l’agriculture française, ce “messager des champs” – le terme d’agronome n’existait pas encore – a travaillé toute sa vie à améliorer les techniques agricoles par l’expérimentation.

Il est connu notamment pour avoir perfectionné le travail de la vigne et du vin.

Il rapporte d’Helvétie quelques plans de “cartoufle” comme il l’appelle.[2]

Mais ce nom ne dure pas dans le temps.

La fameuse tubercule devient la pomme de terre. Elle est présentée à la cour du roi Louis XIII qui y goûte assez peu.[1]

Ce n’est pas une surprise, les variétés de l’époque n’ont rien à voir avec celles d’aujourd’hui.

La pomme de terre est aqueuse et amère, elle n’a pas grand chose pour plaire.

 

Une tubercule anti-famine

C’est un autre géant de l’agronomie française qui a permis l’adoption de la pomme de terre par les Français : Antoine Augustin Parmentier.

Il a donné son nom au hachis et à d’autres recettes comme le parmentier de canard.[3]

En 1769, la famine touche la France. Le pouvoir royal se demande comment éviter ces situations désastreuses pour la stabilité du pays.[1][4]

Parmentier opère une série de sélections qui rendent sa pomme de terre plus goûtue.

Les autorités royales lui attribuent un terrain de 23 hectares dans les plaines des Sablons, à côté de Paris.[4]

Le but de l’expérience est de montrer que le précieux tubercule peut pousser sur une terre inculte et sèche avec six semaines de retard sur les semis de février.[4]

L’avantage de ce décalage est qu’il facilite le travail des paysans, dont le temps de semailles serait alors plus étalé dans le temps.

 

Maraudes de pomme de terre

La légende veut qu’Antoine Parmentier ait fait garder son champ le jour par des gardes royaux pour faire croire que le tubercule avait une valeur inestimable, et ainsi favoriser les vols, la nuit au moment où personne ne surveillait.[1][4]

Mais pour l’historien de l’alimentation, Pierre Leclercq, ce ne sont que des rumeurs.[4]

En réalité, il y a bien eu des maraudeurs, mais Parmentier ne s’en serait absolument pas réjoui !

Ces vols de pomme de terre ont eu lieu dans un autre champ attribué aux expériences de Parmentier. Il s’agissait d’une parcelle sur la plaine de Grenelle.[4]

Aujourd’hui, les deux lopins de Parmentier sont des quartiers habités et parmi les plus chers de France ! L’un est à Neuilly sur Seine, l’autre dans le 7e arrondissement de Paris. C’est le quartier des ministères…

Si les maraudes n’ont guère plu aux promoteurs de la pomme de terre, elles ont montré, toutefois, l’intérêt de la foule pour les travaux de Parmentier qui n’hésitait pas à mettre son champ en avant, à le faire visiter au public.

Ces cultures au milieu de la ville avaient tout d’une opération de communication  !

 

Amie des agronomes plus que des nutritionnistes

Si la pomme de terre a fait son entrée dans la gastronomie française par la grande porte avec tout le soutien des autorités de l’époque, les nutritionnistes aujourd’hui ne l’apprécient plus vraiment.

Il avancent deux grands arguments :

1/ la pomme de terre contient des saponines. Ces substances servent à protéger le tubercule des insectes et des bactéries. Elles sont très puissantes. Sans surprise, elles ont donc également un effet très négatif sur la flore intestinale.[5][6]

Les saponines sont surtout présentes dans la peau de la pomme de terre mais la chair en contient également. Chez certaines personnes, 100 g de chair de pomme de terre suffirait à augmenter leur perméabilité intestinale.[5]

Ces substances sont également considérées comme des antinutriments, c’est-à-dire qu’elles empêchent certains nutriments d’être absorbés.

Non seulement, elles sont toxiques mais en plus elles empêchent les bons nutriments d’aider votre corps !

2/ la pomme de terre a un indice glycémique très élevé. Il est situé autour de 110 pour la frite et de 90 pour les pommes de terre. Il est un peu plus faible lorsque les pommes de terre sont cuites avec la peau.[5]

Ainsi, lorsque vous consommez des pommes de terre, votre taux de sucre présent dans le sang monte en flèche. Puis, il retombe drastiquement au bout de quelque temps.

Cela peut créer une fatigue soudaine une heure ou deux après votre repas, fatigue que vous n’aurez peut-être pas associée à la pomme de terre !

Ces raisons ont conduit les tenants de l’alimentation paléolithique comme le Dr Loren Cordain à recommander d’éviter les pommes de terre dans l’assiette.[5]

Le régime paléo est une alimentation proche de celles des chasseurs-cueilleurs du néolithique.

L’accent est mis sur les fruits et légumes que l’on peut cueillir, et les produits animaux. Les céréales sont généralement écartées ou limitées.[6]

De même, les régimes anti-inflammatoires recommandent de limiter la consommation de ce tubercule.[7]

 

Des pommes de terre : oui mais pas trop souvent !

Maintenant que vous savez que les pommes de terre sont en partie toxiques à cause de ces fichus saponines, vous hésitez peut-être à en cuisiner.  

Peut-être même m’en voulez-vous un peu !

Tant que vous ne saviez rien, vous pouviez les dévorer les yeux fermés !

En plus l’histoire du jour commençait bien avec nos agronomes les plus célèbres : Olivier de Serre et Antoine Parmentier !

C’est que, au fil des siècles, les objectifs ont changé.

Notez que c’est une bonne chose.

Les recommandations d’aujourd’hui visent à améliorer la santé. Au 18e siècle, on cherchait à éviter la famine !

On ne s’inquiétait pas vraiment de la présence de quelques antinutriments !

Il y a donc du bon dans notre époque.

La question toutefois reste entière : qu’allez-vous mettre dans votre assiette et celle de vos convives ?

Vous l’aurez compris, d’abord il paraît utile pour tous de limiter la consommation de pommes de terre.

Elles ne peuvent pas constituer la base de votre alimentation.

 

Quelle cuisson pour quel convive ?

Ensuite, vous devez faire le point sur votre état de santé ou votre état digestif.

Sentez-vous la différence quand vous consommez ou non des pommes de terre, des frites ou des chips ?

Vous pouvez également prendre en compte le mode de cuisson : cuites au four ou à la vapeur, les pommes de terre sont plus saines qu’en friture.

Par ailleurs, les pommes de terre froides sont plus digestes que chaudes. Cela est dû à la structure de l’amidon qui change avec la température.[8]

Si vous gardez la peau vous aurez un indice glycémique plus faible mais un taux de saponine plus élevé.[5][9]

Les pommes de terre bleues, violettes ou jaunes seraient un peu plus riches d’un point de vue nutritif que les blanches.[9]

Enfin, dans vos pommes de terre, il y a aussi de bonnes choses comme des fibres, du cuivre, du potassium, du manganèse et des vitamines du groupe B.[8][9]

Voici donc le verdict : si votre santé est bonne et si les pommes de terre vous conviennent, en consommer de temps en temps en accompagnement d’un repas qui comprend aussi des légumes, n’est pas un problème.

En revanche, si vous avez des problèmes digestifs et notamment inflammatoires comme une maladie de Crohn, il vaut mieux les éviter.

Naturellement vôtre,

Augustin de Livois 

 

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *