Se lave-t-on trop ?

Chère lectrice, cher lecteur,

Il y a quelques jours, au cours d’un dîner avec des amis, j’ai raconté l’expérience d’un journaliste américain du nom de James Hamblin qui a décidé de ne plus se laver.

Les réactions n’ont pas tardé !

Certains se sont montrés franchement dégoûtés, tandis que d’autres ont avoué sans complexe ne pas prendre de douche tous les jours.

J’ai constaté à quel point cette anecdote amusante au premier abord pouvait susciter un débat enflammé.

La question de la douche quotidienne, convention sociale pour les uns, geste d’hygiène incontournable pour les autres, n’a laissé personne indifférent.

Se doucher tous les jours est-il indispensable et bon pour notre santé ? Rien n’est moins sûr, voici pourquoi.

Les Français sentent-ils vraiment mauvais ?

À l’étranger, les Français ont la réputation d’être quelque peu laxistes en matière d’hygiène corporelle.

La raison ? Une enquête parue dans les années 1950 dans le magazine Elle. Elle mettait en évidence les conditions déplorables d’hygiène en France.

C’est cet article qui serait à l’origine des clichés sur le manque de propreté des Français.

De cette réputation peu flatteuse serait né, aux États-Unis, le personnage de dessin animé malodorant « Pépé le putois ».

Il faut dire qu’à l’époque tout le monde n’avait pas accès à l’eau chaude et à une pièce dédiée à la toilette.

Une étude menée1 cette année montre que la norme a bien évolué, et pourtant, tout le monde ne se plie pas pour autant à la douche matinale quotidienne.

D’après cette étude, 76 % des Français font une toilette complète tous les jours, (81 % pour les femmes contre 71 % pour les hommes).

À titre de comparaison, en 1950, seule une femme sur deux se lavait quotidiennement.

L’absence de douche quotidienne dépend de nombreux facteurs comme l’âge, le fait de vivre en ville ou en zone rurale, ou la catégorie sociale.

Aujourd’hui, la France est dans la moyenne mondiale en termes de pratique d’hygiène.

Seuls les Australiens, les Colombiens, les Mexicains, les Brésiliens et les Indonésiens nous battent à plate couture avec une moyenne de 7 à 12 douches par semaine ! En revanche, nous nous situons devant les Anglais, les Allemands, les Russes et les Chinois.

Se laver… une histoire de mode

La propreté corporelle a, tout au long de l’Histoire, connu des normes très différentes.

Les Romains étaient férus des bains publics. Se laver consistait alors à s’enduire d’huile, à transpirer dans les bains et à se racler la peau à l’aide d’un ustensile en métal pour retirer la crasse.

En Europe, plusieurs épidémies au Moyen-Âge ont instillé l’idée que l’eau était source de maladies.

C’est ainsi que la toilette sèche est entrée dans les mœurs à la Renaissance. On se frottait alors simplement le corps avec un linge propre et l’on se contentait de changer de chemise. Personne n’aurait songé à vous dire que vous étiez sale en faisant ainsi.

Au XIXème siècle, un lavement à l’éponge et à la bassine était de mise.

Mais aujourd’hui, nous trouvons les odeurs corporelles intolérables.

Si bien qu’en plus de beaucoup nous laver, nous masquons le moindre effluve naturel à grands renforts de savon, de parfums, et autres déodorants.

L’industrie cosmétique : la grande gagnante de notre société aseptisée

Seule gagnante de cette bataille contre les mauvaises odeurs : l’industrie cosmétique.

Elle empoche chaque année des centaines de millions sur notre dos.2 Car après nous être trempéssavonnés puis exfoliés, nous devons nous couvrir de crème hydratante pour adoucir notre peau sèche et éviter les démangeaisons qui vont avec.

Quelle ironie !

Le plus grand organe de votre corps est fragile

Le principal problème dans le fait de trop nous laver est simple : nous abîmons notre peau.

Cet organe (le plus grand que nous ayons) est constituée d’un film hydrolipidique protecteur qui joue un rôle barrière considérable contre les invasions bactériennes. Ce film a des propriétés très spécifiques, il est composé d’un pH acide, d’une flore bactérienne bien à lui, etc.

Or, les gels douche, les savons et l’eau souvent calcaire de nos habitations fragilisent ce film et le déséquilibrent.

Nos produits cosmétiques : des nids à cochonneries

Au-delà des substances suspectes (voire cancérigènes, je vous en reparle plus bas) que l’on trouve dans nos cosmétiques (parabènes, triclosan, benzophénone, phénoxyéthanol, sodium lauryl sulfate…) certaines pathologies associées à un excès d’hygiène sont récurrentes.

Notamment :

  • l’eczéma ;

  • le psoriasis ;

  • les verrues ;

  • les dermites en tous genres ;

  • une moindre résistance aux agents infectieux et aux allergies.

Le Dr C. Brandon Mitchell, dermatologue à l’Université Georges Washington, le confirme : « Je pense que la plupart des gens se lavent trop… Votre corps est une mécanique bien huilée, une douche quotidienne n’est pas nécessaire, une ou deux par semaine suffisent amplement »3.

Même discours en France : « En dermatologie, nous recommandons de ne se laver qu’un jour sur deux lorsqu’on veut limiter les problèmes de peau, notamment chez les enfants », affirme Nina Ross, dermatologue à Paris.

J’entends d’ici certaines voix s’élever : « Bon, d’accord, mais je ne veux pas sentir mauvais ! »

Je vous rassure, il existe des solutions pour se laver moins… sans sentir mauvais.

Le phénomène Unwashed

Aux États-Unis les « unwashed » (littéralement les « pas lavés ») et leur mouvement remettent en question nos habitudes. Leur credo ne consiste pas à arrêter de prendre soin de soi, mais à prendre soin de soi différemment.

Richard Nikoley compte parmi les pionniers de cette tendance.

En 2009, il relatait sur son blog son expérience4 similaire à celle de James Hamblin dont je vous parlais au début de ce message.

Tout comme ce dernier, il affirme qu’après une période désagréable où son corps a dégagé de fortes odeurs, une régulation naturelle s’est mise en place.

L’arrêt du shampoing s’est manifesté dans un premier temps par une phase où s’est cheveux ont été un peu gras, puis peu à peu ils sont redevenus soyeux et bien plus beaux qu’auparavant.

Idem pour sa peau.

Son témoignage n’est pas marginal et la toile regorge de personnes ayant obtenu le même résultat.

Nulle maladie ou exclusion sociale à l’horizon !

Comment se laver autrement ?

 

Si les unwashed zappent eau et savon pour un retour au naturel et contre les normes de la société de consommation, ils n’ont pas pour autant abandonné toute forme d’hygiène.

Voici quelques idées pour être parfaitement propre en préservant votre équilibre naturel.

  • Le spray « Mother Dirt » développé par le chimiste David Whitlock (chercheur au MIT). L’efficacité de ce produit repose sur une bactérie naturelle, nommée Nitrosomonas Eutropha. Elle a le pouvoir de décomposer l’ammoniac, le composé chimique responsable de l’odeur de transpiration. David Whitlock assure que son spray lui permet de ne pas sentir mauvais, même sans prendre de douche.

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